La Tunisie antique
Nombreux sont celles et ceux qui, lors d’un séjour balnéaire en Tunisie, se sont contentés d’une excursion furtive. Ils ont manqué les trésors inestimables que sont les sites archéologiques de ce pays répartis sur tout le territoire à plus de 25 exemplaires.
Le retour des cendres d’Hannibal à été une préoccupation des deux présidents tunisiens Bourghiba et Ben Ali. Nul ne peut imaginer au stade actuel si cette préoccupation reviendra sur le tapis de la culture tunisienne. Toujours est-il qu’il y a plus d’une dizaine d’années, un groupe de chercheurs, d’archéologues, d’artistes, d’enseignants et de professionnels tunisiens du tourisme, avec l’appui des ministère de l’éducation et du tourisme, lançaient une opération du nom de «retour de la mémoire d’Hannibal». Parallèlement, tout un programme des écoles était rédigé en ce terme avec pour thème: «Nos ancêtres, les Carthaginois». Il semble qu’à cette époque l’idée était de mettre dans la tête des enfants tunisiens que leurs ancêtres pouvaient être Arabes, certes, mais aussi Phéniciens, Aghlabides, Berbères, Vandales, Andalous, Fatimides, Ottomans, et beaucoup de petites tribus locales. Ensuite, une caravane éducative avait suivi partiellement la route empruntée par Hannibal pendant la 2e guerre punique dans un but pédagogique et de promotion touristique, mais aussi avec l’arrière-pensée d’un rapprochement entre les pays du nord et du sud de la Méditerranée.
De toutes les périodes de colonisations qu’a connues la Tunisie antique, ce sont celles des Phéniciens et des Romains dont subsistent les plus beaux témoignages.
Pour bien commencer un apprentissage ordonné de l’Antiquité tunisienne, une bonne formule est de se rendre au musée du Bardo à Tunis. Elle regroupe les plus belles mosaïques datant principalement des époques romaine et punique et relatant l’histoire, la mythologie, la religion et la vie quotidienne de l’Antiquité. Ces splendeurs ont été collectées ici et là dans plusieurs sites du territoire tunisien.
La grande Carthage
Sans pour autant oublier sa création en 814 avant J.C. par Elissa-Didon et ses compagnons phéniciens de Tyr, c’est l’époque punique qui prédomine à Carthage. C’est de cette cité commerçante, qu’on peut avoir un aperçu des ports puniques (port commercial et port de guerre), qui revivent grâce à leur reconstitution en maquettes au musée de Carthage, où sont aussi exposés de nombreux objets passionnants provenant de l’exhumation pendant les fouilles.
En fait, c’est l’entière ville de Carthage qui a été construite par-dessus la ville punique.
Des fouilles sont menées en permanence dans les espaces où il est possible de creuser sans avoir à expulser des habitants de cette zone résidentielle. Ces fouilles ont notamment mis à jour des rues entières, et, dans l’une des maisons adjacentes, l’une des plus anciennes mosaïques au monde représentant la déesse Tanit.
Hormis les vestiges phéniciens, Carthage possède également des témoignages de la civilisation romaine, dont on retiendra les thermes d’Antonin et l’aqueduc de Zaghouan.
Dougga
Certes, la splendeur des villes romaines de la Libye est incomparable, mais vous découvrirez assez vite que les sites romains de la Tunisie n’ont rien à leur envier. Dougga ne reflète pas uniquement la civilisation romaine, mais aussi la numide.
Elle fut créée par César en 205 après J.C pour gérer la province qui portait le nom d’Africa Nova, et qui connut son apogée 55 ans plus tard. C’est l’un des plus beaux joyaux du patrimoine tunisien. On y retiendra son théâtre pouvant accueillir jusqu’à 3500 spectateurs, ses thermes liciniens et son capitole le mieux conservé d’Afrique du Nord.
Sbeitla (Sufetula)
C’est sans conteste le second plus beau site romain tunisien. Il se situe à la limite de la Dorsale et des steppes de la Tunisie centrale.
D’origine berbère, Sufetula gravit rapidement les échelons de la municipalisation, passant de municipe à colonie, témoin de sa romanisation et de son intégration économique et culturelle. A l’avènement du christianisme, elle devint le siège d’un évêché et, par la suite, passée l’époque vandale, elle fut fortifiée par les Byzantins qui, dans la première moitié du VIIe siècle, à l’initiative sécessionniste du patricien Grégoire, en firent une capitale. En 647 après J.-C., la cité tomba sous les coups de l’armée arabe d’Abdallah Ibn Saad.
Le site de Sufetula présente un urbanisme régulier, où les rues rectilignes se coupent à angle droit et délimitent des insulae réservées aux habitations. On y remarque un forum qui abrite notamment un capitole formé de trois temples dédiés à la triade capitoline: Jupiter, Junon, Minerve.
Kerkouane
Cité punique du Cap-Bon, à 12 km au nord de Kélibia, elle constitue le meilleur témoignage de la civilisation phénicienne. Outre les restes d’un vaste sanctuaire, on y découvre un urbanisme géométrique bien maîtrisé, avec des rues rectilignes organisées en un réseau en damier et délimitant des insulae réservées aux habitations souvent dotées de salles de bain composées d’un vestiaire et d’une baignoire-sabot avec siège!
Bulla Regia
Située à quelques kilomètres de Tabarka, Bulla Regia n’était qu’une simple bourgade aux débuts de l’époque romaine. Elle fut carthaginoise au 4e siècle avant J.C., puis numide sous le règne de Massinis, et le lieu de refuge du roi numide Hiarras, qui voulait échapper aux légions romaines de Pompée.
C’est en 46 avant J.C. que, finalement, Bulla Regia devint romaine. La cité est encore en grande partie sous terre, car seule une partie a pu être dégagée. On retiendra les monuments bien conservés tels que le théâtre. Bulla Regia est le seul site archéologique tunisien possédant des maisons à deux étages dont un sous-sol, ce qui en fait son originalité. On imagine que ce mode de construction avait pour but de se protéger des chaleurs excessives du lieu.
Gérard Blanc