La beauté simple des Pouilles
Le nom de «Pouilles» a eu un tel impact négatif auprès des francophones (Pouilles = pays des pouilleux) que cette région, pourtant l’une des plus belles de l’Italie, se présente maintenant en langue française sous le nom d’Apulie. C’est l’enchantement de ses paysages, de son habitat hors de commun, de ses traditions et de son art religieux, sans oublier sa gastronomie paysanne pour compléter le tableau enchanteur.
Un conte de fées: L’image porte-drapeau des Pouilles est sans conteste ces maisonnettes insolites aux toits coniques surmontées d’un pinacle et aux murs blanchis à la chaux qu’on croirait sorties d’un conte de fées qui portent le nom de trulli. On les trouve aux alentours et dans le village même d’Alberobello, qui en compte le plus grand nombre au kilomètre carré. On y accède en quittant Tarante en direction de Bari. On est heureux comme un gamin dès qu’apparaît la première ferme-trulli au milieu d’un champ, à l’approche de Martina Franca. En s’enfonçant davantage dans la région des Murges, ce sont des centaines de trulli qui se dressent dans le paysage.
Village de poupées
Alberobello est incontestablement la capitale des trulli, dont la colline sud, classée monument historique, est entièrement couverte de trulli. Ces maisons sont alignées sur l’accotement de six rues sinueuses et parallèles. Les curieux useront de diplomatie pour lier conversation avec un habitant qui vous invitera à jeter un coup d’oeil à l’intérieur et découvrir des signes d’une culture paysanne ancestrale, comme, par exemple, un coffre antique en bois précieux, la cheminée et sa crémaillère, un métier à tisser, etc. Mais la maîtresse de maison sera aussi fière de vous montrer qu’elle a tout le confort moderne. Certains trulli sont plus spectaculaires que d’autres, tels le trullo Siamois sur le Rione Monti, le trullo de Paparale avec ses deux coupoles et son plan elliptique, la Cantina del Mylord et la cour Mazarrese. La cerise sur le gâteau est le trullo Sovrano, seul au monde à deux étages.
Des tribus venues du Moyen-Orient s’installèrent jadis dans les Pouilles. Elles élevèrent des tumulus pour enterrer leurs morts et bâtirent des maisons de pierres circulaires pour se protéger des intempéries. Les ruines de ces habitations sont aujourd’hui appelées specchie et se trouvent encore en grand nombre dans les champs. Par la suite, des populations venues d’Anatolie adaptèrent l’habitat en y ajoutant des coupoles coniques. La dernière touche fut donnée par les colons grecs, qui y ajoutèrent le blanchissage à la chaux.
La région des Murges s’étend jusqu’à la côte nord des Pouilles, dont la fine fleur est la cité médiévale de Monopoli, avec ses remparts plongeant dans la mer et son charmant petit port de pêche. D’autres sites intéressants de la région sont, parmi d’autres, Martina Franca, ses maisons blanches et ses édifices baroques qui dominent la plaine des Murges; et Ostuni, une ville immaculée, disposée sur trois collines et dont les couleurs des maisons oscillent entre le blanc et le rose selon les heures de la journée. Les grottes de Castellana sont un must; les visites sont guidées et programmées, et les portes sont fermées en attendant la visite suivante. En circulant entre Monopoli et Castellana, on se trouve dans une campagne verdoyante parsemée de splendides villas anciennes, dont certaines peuvent d’ailleurs se visiter.
L’éperon
On assimile la géographie physique de l’Italie à une botte avec son talon (les Pouilles) et sa pointe (la Calabre). Sur le talon il y a un renflement surnommé l’éperon: c’est la région du Gargano au nord des Pouilles.
Elle a deux particularités: les côtes aux falaises de calcaire découpées qui s’écrasent en dentelles dans le bleu turquoise de l’Adriatique et la région montagneuse de l’Umbra.
Ce sont avant tout ces fameuses falaises d’un blanc éclatant qui caractérisent le Gargano, la région des Pouilles que les gens du pays appellent le «promontoire». A certains endroits, l’érosion a sculpté des éperons, des arches ou des aiguilles dans les falaises de la côte. Les plus beaux exemples sont le rocher de Pizzomuno au pied de la falaise de Vieste, ou encore les Faraglioni de Mattinata qui imposent leur splendeur à la Grande Bleue. Ce sont, de Manfredonia au lido de Torre Vieto, tout un collier de plages, certaines de sable, d’autres de galets.
L’Umbra
En quittant Vieste, ce sont des routes tortueuses au milieu de forêts de hêtres qui vous guident vers les points culminants du Gargano. De temps à autre, des prairies à flanc de colline jonchées de cailloux offrent une pâture royale à des troupeaux de chèvres ou de moutons, gardés par des bergers nonchalants, une image d’Epinal identique à celle des Causses ou des Cévennes en France. Les paysages s’agrémentent de petites villes perchées au sommet de pitons rocheux avec, pour exemple, la ville de Monte San Angelo, aux maisons aux murs blancs collées à la montagne.
Les agglomérations sont aussi pittoresques les unes que les autres, comme Mattinata et ses vieux quartiers aux maisons de maître aux balcons baroques, ou Manfredonia et son château normano-angevin massif.
Sur une falaise perchée
Chef-lieu du Gargano, Vieste est l’une des villes côtières les plus pittoresques des Pouilles, en haut d’une grande falaise de craie et dominant la grande plage de sable blanc avec le fameux rocher du Pizzomuno à son extrémité orientale. Mais Vieste est avant tout une ville médiévale avec son dédale de petites rues bordées de maisons d’époque aboutissant à des terrasses au ras de la falaise. Outre sa cathédrale du 11e siècle, Vieste abrite une quantité impressionnante de petites églises et chapelles que l’on découvre aux détours des petites ruelles étroites.
La serre de Salento
La péninsule salentine se trouve à l’extrémité du «talon de la botte». C’est la zone la plus plate et caillouteuse des Pouilles qu’on surnomme la «serre salentine» en raison de son climat doux. Ses côtes tombent à pic dans le bleu profond de l’Adriatique. C’est une palette de couleurs entre le blanc des falaises et des maisons peintes à la chaux, le jaune des façades baroques, le rouge-ocre de la terre et les bleus changeants du ciel et de la mer.
Ce sont aussi des côtes découpées, ponctuées de petits ports pittoresques comme, par exemple, celui de Marina di Novaglie, avec son air de calanque marseillaise, dominé par la pergola d’un petit restaurant de poissons. C’est aussi dans cette région que l’on peut voir, plantés au milieu des champs, les specchie, ces édifices coniques de pierres semblables à des marabouts nord-africains.
Cette partie des Pouilles est remarquable pour ses cités historiques, dont l’architecture est majoritairement de style baroque espagnol, particulièrement dans les villes de Lecce et d’Otrante.
Lecce
Elle fut messapienne, romaine, grecque et espagnole, mais on l’appelle «l’Athènes des Pouilles» à cause de la civilisation qui l’a influencée pendant deux siècles. Une autre appellation, plus adéquate, serait celle de «Florence du Midi», rapport à ses palais et ses églises de pierre rosée, que l’on apprécie encore davantage dans la lumière plombante de fin d’après-midi. C’est alors que ressortent à merveille les façades des églises et les balcons baroques inspirés par les Espagnols. Les meilleurs exemples sont les églises de San Matteo ou de Santa Croce. Espaces dégagés au milieu d’un dédale de ruelles, les cours des églises des Saint Niccoló et Cataldo et la basilique de Santa Croce sont de véritables chefs-d’oeuvre architecturaux. Le centre de Lecce, et, plus particulièrement la piazza San Oronzo, où se dresse la colonne marquant la fin de la Via Appia, est aussi le centre d’une animation permanente, faite de rendez-vous de motards ou de meetings politiques.
Otrante
A 60 kilomètres de Lecce se trouve la ville fortifiée d’Otrante et son port de pêche et de ferries. Le château aragonais d’Otrante, rendu célèbre par le romancier Horace Walpole, trône au centre de fortifications médiévales d’origine normande, de ruelles étroites et de petites places pavées, d’escaliers et de murs. La place du château domine l’Adriatique d’un côté et le port de l’autre, et on imagine alors l’activité commerçante qui régnait dans cette cité aux temps des Vénitiens, des Juifs, des Dalmates et des Levantins.
Gérard Blanc
Infos pratiques
Agence spécialisée
Géo-Découverte, +41 22 716 30 00. www.geo-decouverte.com.
Vols
Genève-Rome-Brindisi ou Bari avec Alitalia; Genève-Brindisi avec easyJet.
Hôtels
Les trulli: Il Melograno à Monopoli (Relais et Châteaux); Borgo San Marco à Fasano (charme); Frantoio à Ostuni (agritourisme de charme). Matera: Locanda San Marino (charme). Gargano: Dei Faraglioni à Mattinata; Degli Aranci à Vieste (hôtel famille); Salento: Risorgimento à Lecce; Patricia à Lecce. Otranto: San Giuseppe; Tenuta Centoporte. Gallipoli: Don Cirillo à Ugento; Rodogallo (charme) à Gallipoli.
Les musts inscrits au patrimoine de l’UNESCO: Castel del Monte, les trulli d’Alberobello, Sassi et l’ensemble des églises rupestres de Matera.
Pique-niques
Un bon moyen de prendre contact avec la population est d’entrer dans une salumeria et de choisir les ingrédients de son pique-nique (salami, jambon cru, fromage, vin, etc.).
On découvre la gentillesse et la simplicité des habitants qui ne sont pas blasés par le tourisme de masse.