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JE PARS À LA DÉCOUVERTE

Villes impériales marocaines : Sur les traces des sultans

Le point commun des villes impériales marocaines de Fès, Rabat, Meknès et Marrakech se résume à leur ancienne appartenance aux sultans almoravides, almohades, alaouites ou mérénides, portant des noms tels que Yacoub El Mansour, Moulay Ismaïl ou Moulay Abdallah. Mais la similitude s’arrête là, car elles ont chacune leur personnalité.

Noblesse et tradition obligent: chacune d’entre elles possède un palais apte à recevoir dignement Mohammed VI, l’actuel roi du Maroc. Mais le visiteur y trouve aussi une grande variété d’habitats, de ruelles commerçantes étroites et de remparts à perte de vue. Nous avions déjà parlé de Marrakech dans le No 1 de Je Pars (25 février 2005). Il restait donc à vous décrire Rabat, Meknès et Fès, moins courues peut-être, mais possédant aussi infiniment de charme.

RabatRabat
Capitale incontestée depuis 1912, Rabat est la résidence permanente de Mohammed VI, comme elle a été aussi celle de son père, Hassan II et de son grand-père Mohammed V. C’est là aussi que se trouvent enterrés ces deux anciens rois dans un mausolée construit exprès pour eux. Sur l’esplanade de cet édifice a été érigée la tour Hassan, minaret qu’on dirait inachevé. Mais, à mon goût personnel, l’un des sites les plus fascinants de Rabat est tout d’abord la kasbah des Oudaias, dans laquelle il faut se perdre dans des ruelles blanchies à la chaux et parsemées de poteries fleuries. L’une d’entre elles débouche sur la terrasse d’un café où, en dégustant une pâtisserie aux amandes appelée «corne de gazelle» que l’on accompagne d’un thé à la menthe parfumé et brûlant, on a une superbe vue panoramique sur le port de pêche, sur l’embouchure de l’oued Bou Regreg et, plus loin, sur la plage et les remparts de la ville de Salé. Site archéologique, s’il en est un à Rabat, la nécropole des anciens Mérénides de Chellah (13e siècle) est au centre d’un environnement urbain, un petit oasis de verdure avec quelques reliquats de mosaïques et de tombeaux anciens et, en prime, d’antiques minarets squattés par des cigognes.

AU TEMPS DES ROMAINS
S’il est un site archéologique essentiel au Maroc, c’est bien celui de Volubilis. Il faut en premier lieu parler de sa situation grandiose, cernée par les sommets de l’Atlas et avec vue sur la ville sainte de Moulay Idriss à flanc de montagne. L’ autre raison est historique: c’est le site le plus beau du Maroc, ayant des origines à la fois des Romains et des Carthaginois (Phéniciens). Les empereurs Octave, Juba II et Caligula s’y succédèrent après avoir succédé eux-mêmes à des peuplades berbères. Disons que parmi les vestiges subsistant des anciennes cités préromaines, romanisées et des premiers musulmans, on trouve les composants classiques, comme les thermes, un agora, des arcs et des restes de temples, mais surtout des colonnes particulièrement prisées par des cigognes qui y ont installé leurs nids.

Meknès
Celle qu’on appelle aussi l’»Impératrice des oliviers» est, et c’est bien dommage, beaucoup moins connue que Fès ou Marrakech. Et, pourtant, Meknès mérite bien une étape de quelques jours. La fertilité de sa terre et la douceur de son climat en font une oasis de verdure composée d’oliveraies et d’orangeraies avec, pour toile de fond, le massif du Zerhoun. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les tribus des Meknassas (d’où le nom), des Almohades, des Almoravides et autres Mérénides s’y plurent au point de se sédentariser au bord de l’oued Boufekrane et de créer celle qui allait devenir Meknès, en y ajoutant une pointe religieuse.
Meknès se sépare en deux entités distinctes que sont la nouvelle ville d’inspiration européenne d’un côté et l’ancienne ville ou médina, de l’autre. A l’instar de Fès, Meknès est un entrelacement de remparts à l’infini, prétexte à de superbes portes décorées dont la plus spectaculaire est celle de Bab-El-Mansour, la plus belle de toute l’Afrique du Nord, mais aussi bien d’autres, comme la porte Berdaïm. Une autre porte à admirer est celle de Bab el Khémis (ou Porte du jeudi), ornée de mosaïques émaillées à dominante verte et dont le nom provient d’un marché qui s’y tenait le quatrième jour de la semaine. Il faut aussi admirer la porte Bab Jamâa En Nouar qui domine la place centrale et ses impressionnantes arcades et, pour couronner le tout, le superbe palais Dar Kébira, un édifice qui fut jalousé par les cours d’Orient et d’Europe, notamment par la cour du Roi-Soleil.
Bien que prestigieux, il est dommage de constater que les haras nationaux qui, pourtant, sont inscrits dans la visite classique de Meknès, offrent aussi peu de possibilités de s’informer sur l’un de ses buts principaux qu’est la préservation de la race chevaline arabe, la visite se limitant à quelques box. MeknesPour revenir à la médina, une visite particulièrement insolite est celle de l’ancienne école coranique Abou Ihan, où les élèves bénéficiaient d’un traitement de faveur ou, a contrario, d’un régime carcéral, selon leurs résultats scolaires, enseignement qui consistait principalement à apprendre par coeur les versets du Coran. Une autre visite est à réserver au gigantesque bassin d’Agdal, jadis bâti pour irriguer les jardins de la sultane. Il est entouré de bâtiments ayant servi aux sultans pour engranger la nourriture de ses quelques 12 000 chevaux. Le palais Dar el Makhzen se découvre après avoir longé un long couloir entre deux murailles.
Autre must: la visite du mausolée de Moulay Ismaïl. Il se compose de deux salles dont seule la première est accessible aux non-musulmans.
L’ambiance populaire se trouve sur la place El Hedim (appelée aussi place des Décombres) où, en fin d’après- midi, les marchands ambulants déploient leurs étalages d’épices et s’agitent les marchands d’eau et leurs clochettes, les charmeurs de serpents, etc. pour attirer l’attention, à l’instar de la place Jemaa el Fna de Marrakech.

LES NEIGES DE L’ATLAS
Si 36 à 40 degrés à l’ombre sont des températures d’été, et même de printemps, il suffit de parcourir environ 30 kilomètres pour aller jusqu’à la station d’Ifrane ou d’Azrou dans l’Atlas. La température tombe brusquement de 20 degrés et les passants mettent volontiers des vestes ou des parkas. Incroyable non? Sachez que ces stations, en période d’hiver, n’ont rien à envier à celles de la Suisse et de la haute Savoie et sont même équipées de remonte-pentes pour les adeptes du ski ou du snowboard. Seul problème: le matériel. Les magasins marocains manquent cruellement de skis et sont prêts à acheter tout ce qui passe. En débarquant à Ifrane, on a l’impression d’être rentré en Europe avec des maisons aux toits en pente aux ardoises rouges.

Fès
Cette ville est un véritable enchantement, ne serait-ce que pour la vue de cette immense marée de toits de la vieille ville qui s’offre aux yeux lorsqu’on grimpe sur les belvédères d’une des deux forteresses ou «Borj» (nord ou sud): Fès El Bali, à l’est et le quartier Andalous, où vécurent pas moins de 800 familles andalouses sur la rive droite du fleuve Udwat al-Andalous au 9e siècle. C’est précisément là où se trouvent concentrés encore aujourd’hui des ateliers d’artisanat, tels que la céramique ou la tannerie. Comme toujours, il y a les ateliers prévus à la visite des touristes, mais d’autres peuvent également être visités, à condition de les découvrir par soi-même et de se montrer très respectueux du travail en train de s’accomplir. C’est en parcourant les quelques 9500 ruelles des quartiers d’El Bali (ancien quartier juif) et d’El Jedid (jadis réservé aux familles riches et nobles) qu’on découvre la vraie vie de la médina.
FesFort heureusement, un balisage par thèmes a été instauré à Fès, sinon, le risque serait grand de se perdre et de manquer, par exemple, la mosquée de la Quarouyyin juchée en haut d’un grand escalier (entrée interdite aux non-musulmans, mais très belle vue de l’extérieur); la place Debbaghine, dont l’odeur qui en émane laisse à penser qu’on est proche du quartier des tanneurs; ou encore le marché d’El Attarine, fief des épiciers et superbement coloré. La liste serait longue et fastidieuse de vous citer toutes les «medersas» (maisons seigneuriales), où ont été aménagées ici une université, là une école coranique, ou encore les petites et grandes places animées en permanence. Disons simplement que tous les recoins de cette médina (classée patrimoine mondial de l’UNESCO) méritent qu’on s’y attarde au moins trois à quatre jours.

Les labyrinthes des médinas
Qu’il s’agisse de la kasbah des Oudaias à Rabat, de la médina de Meknès ou pis encore, les deux médinas juxtaposées que sont Fès El Jédid et Fès El Bali, bien pardonnable est celle ou celui qui se perd, malgré bien des points de repères pris et immédiatement confondus car étant semblables les uns aux autres, qu’il s’agisse d’un magasin de babouches colorées, d’une vielle porte cloutée, d’une bijouterie ou d’un marchand de poufs. MeknesUn petit truc que m’a donné un conducteur d’âne qui se ménageait un passage avec sa monture en criant balek! (attention!): les axes où se trouvent la circulation la plus dense mènent toujours à une porte quelconque en périphérie, lesquelles portent un nom et permettent de se repérer. Une chose est sûre, les Marocains qui vous croiseront seront toujours prêts à se mettre en quatre pour vous aider, surtout lorsqu’ils auront repéré en vous une personne respectueuse qui, par exemple, demandera avant de prendre quelqu’un en photo ou retirera spontanément ses chaussures avant d’entrer dans une mosquée ou qui évitera toute tenue provocante. Les médinas des villes impériales marocaines grouillent d’animation avec les milliers de boutiques, les tas de dattes, les gigantesques mottes de beurre rance et les étoffes multicolores, et, nec plus ultra, des artisans, si l’on parvient à se diriger vers les bons endroits, comme les quartiers des potiers ou des tanneurs. Là encore, la politesse paie et les artisans seront prêts à vous faire faire le tour du propriétaire si vous leur demandez aimablement.

Texte et photos Gérard Blanc


Infos pratiques

Renseignements

Office marocain du tourisme : www.officetourismemaroc.com

Comment s’y rendre

Vols Royal Air Maroc jusqu’à Casablanca, Genève Marrakech avec easyJet, Uniquement pour les vols Royal Air Maroc, correspondance tous les jours pour Fès.

Transferts

Casablanca-Meknès, taxi Mercédès (4 à 5 personnes) pour un voyage d’environ 5 heures. Prix par trajet: CHF 130. –. Fès-Meknès, environ CHF 80.– par trajet en taxi Mercédès, mais en marchandant on peut trouver un arrangement avec des taxis locaux pour environ 200 dirhams (CHF 35.–).

Souvenirs

Broderies, artisanat de cuivre, maroquineries, tapis.

Spécialités culinaires

Vin de Meknès (label), huile d’olive, thé à la menthe, couscous marocain (avec une viande – agneau ou poulet – beaucoup de légumes et des raisins secs), tajine de viande aux olives ou tajine de poulet au citron confit. Nec plus ultra: la pastilla (feuilleté de pigeon aux légumes).

Agence spécialisée

Voyageurs du Monde, rue de la Rôtisserie 19, 1204 Genève – Tél. 022 518 04 94.

www.voyageursdumonde.ch

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