Jordanie : les joyaux de pierre hachémites
Au même titre que les sites de Libye, de Turquie ou de Grèce, ceux de la Jordanie tels que Petra ou Jerash occupent une place favorite dans le palmarès des amateurs de vieilles pierres.
La majorité de ceux qui visitent la Jordanie transite par l’aéroport d’Amman. Si vous êtes de celles ou de ceux qui voudront ne faire qu’une bouchée de la Jordanie, peut-être renoncerez-vous à consacrer du temps pour visiter la capitale hachémite. C’est bien dommage, car elle est loin d’être dénuée d’intérêt.
Amman fut choisie en 1917 comme capitale de la Transjordanie par le roi Abdullah. La ville était alors peuplée exclusivement d’environ 100 000 Bédouins. Il faut gravir la colline de la Citadelle pour jouir d’un magnifique panorama, avec une vue sur les nombreux quartiers à flanc de colline, un peu comme d’immenses jeux de cubes sur lesquels auraient poussé ça et là des minarets. Un regard moins superficiel fait découvrir, ici un stade olympique, là un immeuble moderne de plus de dix étages, là une luxueuse villa appartenant à un riche notable, là encore un théâtre datant de l’époque romaine.
Une chose saute aux yeux : Une rigoureuse propreté est de mise, même dans les quartiers les plus populaires. Amman, c’est les beaux quartiers aux splendides maisons de maître rivalisant de luxe, et c’est aussi des larges avenues que traversent des hommes portant leurs inséparables keffiehs de Bédouins de couleur rouge et blanche, qu’ils soient chauffeur de camion ou marchand de journaux. Enfin, Amman est aussi l’exemple même d’une ville du Moyen-Orient qui a grandi un peu trop vite.
Dans le quartier commerçant de Djebel Al Hussein, le visiteur constate immédiatement que la loi coranique n’y est pas rigoureusement appliquée. Les femmes ne portent le voile ou le tchador que si elles le désirent et on trouve du vin de Bethléem ou de l’arak en vente libre dans les magasins.
La Citadelle
C’est le lieu le plus intéressant d’Amman pour celui qui recherche des vestiges culturels. Le Ministère jordanien de la culture et l’UNESCO ont travaillé et travaillent encore pour en refaire un site digne de ce nom. C’est en premier lieu de la cathédrale byzantine que se préoccupent les archéologues, de même que du château, qui fut bâti jadis par les Omayyeds. La Citadelle fut aussi fortifiée par les Romains entre 161 et 180 avant J. C. Autres vestiges intéressants: le cardo (allée centrale) et le temple d’Hercule, qui fut construit sous le règne de l’empereur Marc-Aurèle.
Dans les environs
A environ 30 kilomètres au sud, la petite ville de Madaba, l’ancienne ville biblique moabite de Medeba, fut habitée par les douze tribus d’Israël. Le clou de la visite est l’église orthodoxe grecque de Saint-George. Au milieu des icônes on trouve, à même le sol, une remarquable carte biblique en mosaïque de la Palestine, sur laquelle sont représentés la mer Morte, le Nil, Jérusalem et le Saint-Sépulcre, etc.
La Pompéi de l’Orient
Après le site nabatéen de Petra, la ville gréco-romaine de Jerash est la seconde merveille de la Jordanie. Situé à environ 50 km au nord de la capitale Amman, le site archéologique de Jerash est une véritable splendeur pour les amateurs de l’histoire ancienne. On l’appelle la «Pompéi de l’Orient» en raison de son excellent état de conservation.
En 106 avant Jésus-Christ, les tribus de l’empereur romain Trajan entrèrent en Jordanie et annexèrent le royaume des Nabatéens, un peuple hautement civilisé, avec lequel furent établies des relations commerciales fructueuses. La ville de Jerashfut alors choisie comme camp de base et Trajan entreprit de lui donner une structure résolument romaine. En 63 avant J. C., ce fut au tour de Pompée de conquérir cette région, qui fut intégrée dans la province romaine de Syrie. Enfin, en 129 après J. C., c’est l’empereur Hadrien qui y élut domicile. En hommage à son empereur bien aimé, le peuple entreprit de lui construire un arc de triomphe qui se trouve aujourd’hui à l’entrée du site archéologique. Au 5e siècle après Jésus-Christ, Jerash connut l’ère de la chrétienté et la construction de nombreuses églises. L’invasion des Perses et plusieurs tremblements de terre détruisirent en grande partie Jerash, qui fut vidée d’environ 75% de sa population. Plus tard, les Croisés en firent leur garnison jusqu’à l’arrivée des Circassiens en 1878, lesquels peuplent aujourd’hui encore la plus grande partie de la ville moderne.
Plus que nulle part ailleurs, Jerash représente d’une façon très concrète le mode de vie des Romains et leurs cultes aux dieux avec, ça et là, des témoins des religions chrétienne et juive. Parmi les nombreux monuments, avenues, temples et églises, on retiendra tout d’abord le temple de Zeus. En second lieu, on admirera la majestueuse grand-place circulaire ou forum, dont les colonnes ont su résister aux séismes. Autres monuments remarquables: l’agora (ancien marché), le temple d’Artémis et les marches qui y mènent, le théâtre, l’avenue des colonnades, la cathédrale, etc. Le spectacle peut aussi être dans l’animation spontanée créée par les enfants des écoles qui visitent le site et se laissent parfois aller à une petite danse sur un air bien local. Face au Tetrapylon, le majestueux pont romain fait le lien avec la ville moderne. Aujourd’hui, l’arène de Jerash est animée par des rétrospectives de défilés de troupes romaines, de courses de chars et de combats de gladiateurs.
La cité rose
C’est incontestable, Petra est le joyaux de l’archéologie jordanienne. Par sa seule beauté géologique, et par la majesté des tombeaux et des temples taillés à même la roche, cette cité magique change de couleur à chaque minute, au gré des caprices du soleil, du rouge foncé au rose pâle.
L’idéal serait de bénéficier de trois jours pour voir toutes les merveilles architecturales et géologiques de Petra. Six siècles avant Jésus-Christ, les Nabatéens, ancêtres des Jordaniens, habitaient déjà la région jusqu’à ce qu’Antigone, maître de Babylone, décida d’assiéger Petra sans toutefois parvenir à la prendre. Il semblerait d’ailleurs que les Rois mages aient été des Nabatéens. Petra devint ensuite la capitale d’un fabuleux empire qui s’étendit jusqu’en Syrie. L’empereur romain Pompée, alors maître de la Syrie et de la Palestine, tenta également en vain de s’emparer de Petra. Ce fut finalement Hérode le Grand qui parvint à envahir une partie du territoire de Petra, suivi par les tribus romaines qui, en 106 après Jésus-Christ, s’y installèrent et transformèrent les infrastructures de la cité. Petra connut l’invasion islamique du 7e siècle et le passage des Croisés au 12e siècle. Jusqu’au 19e siècle, la contrée fut presque exclusivement habitée par des nomades, jusqu’au jour où un jeune Suisse du nom de Louis Burkhardt redécouvrit ce trésor archéologique.
Une apparition miraculeuse
Les Nabatéens avaient jadis taillé dans le roc toute une cité troglodyte à même les parois de grès rose-rouge qui bordent le lit du torrent à sec du Wadi Arabadu, à 260 km au sud d’Amman. En grec, Petra signifie rocher. C’est un euphémisme pour le visiteur qui, engagé dans le siq, cette gorge profonde atteignant parfois cent mètres de profondeur, ne trouve que du grès, qu’il regarde à gauche, à droite ou en l’air. La première émotion que l’on ressent en visitant Petra est cette apparition miraculeuse, au bout du goulet, du majestueux temple d’El Khazneh qui, depuis l’ombre du siq, apparaît comme illuminé par un projecteur. Au sommet d’El Khazneh, on découvre l’urne détruite par les bergers à coup de pierres. Elle était censée enfermer un trésor caché par des brigands.
Des ruines par centaines
Tout le long du chemin s’alignent de nombreuses ruines. On retiendra le monastère, sorte de réplique d’El Khazneh, que l’on peut atteindre après avoir gravi environ 800 marches. A cent mètres de là, on arrive au bord d’un précipice, d’où un époustouflant panorama de montagnes et de canyons rocheux font penser au bout du monde. On citera aussi la route bordée de colonnades, le temple des lions, les tombes royales, etc.
Environs
A quelques kilomètres de là se trouve la «petite Petra», un goulet moins étendu mais tout aussi intéressant. A trois cent mètres de la «petite Petra» on tombe sur les ruines du village de Beidha, datant d’environ 9000 ans avant Jésus-Christ.
«Nous nous retrouverons à Wadi Rum !» lança le célèbre T. E Lawrence «Lawrence d’Arabie» à ses troupes en marche pour Aqaba
Pour qui ne l’a pas encore vécu, une visite à Wadi Rum permet cette expérience fabuleuse qu’est celle du désert. Dès que les moteurs des 4X4 ou le halètement du dromadaire se taisent, un grand silence presque assourdissant accentue le battement des tempes. Wadi Rum est un long couloir qui s’étend entre deux massifs de montagnes d’environ 2000 mètres de hauteur : d’un côté les jebels Hubeira et Rum, et de l’autre, les jebels Ishrin, al Kharasah, um Ej’il et Nassraniyyah. Au fond de ce couloir on distingue des pitons rocheux taillés en forme de pyramides. L’endroit est magique. C’est un spectacle majestueux composé de sommets de grès jaune ou rose, aux formes étranges, sculptées par l’érosion du vent, du sable et de l’eau, qui se découpent sur un ciel parfois outremer, parfois bleu ciel. C’est à cet endroit précis que Lawrence d’Arabie, médiatisé avant la lettre par la presse britannique et nord-américaine, était apparu aux Anglais. Ce personnage, sorti d’un conte des «Mille et une nuits», qui fut baptisé «le Prince de la Mecque». C’est d’un récit du héros «Les sept piliers de la sagesse» que fut tiré le célèbre film de David Lean, dont le désert de Wadi Rum servit de décor naturel au tournage.
A Wadi Rum, les rencontres humaines se font rares. Une vingtaine de familles sillonnent le désert et s’installent là où elles auront trouvé un puits pour abreuver leurs chèvres ou leurs moutons. C’est un berger barbu, coiffé de son keffieh, ou un enfant entraîné malheureusement très tôt à mendier un dinar. Au gré du hasard, on peut aussi croiser une patrouille de la police montée du désert. Jadis, son rôle était de surveiller les frontières et traquer les tribus dissidentes. Aujourd’hui, elle parade pour les touristes.
Texte et photos Jean-Jacques Gérard
Informations pratiques
Vols
Genève-Amman avec Royal Jordanian Airlines.
Agence spécialisée
Au tigre vanillé, Hotelplan, Kuoni, Travelhouse, Voyageurs du monde,
Formalités
Passeport valide au moins 3 mois après la date du retour, visa de tourisme.
Santé
Médicaments contre les troubles intestinaux et les angines ou les rhumes; produits contre les brûlures de soleil.
Change
1 franc suisse = 0,70 dinar jordanien.
Restaurants
A Amman: Le Kan Zaman (animation folkorique, buffet), le Rim el Bawadi, le Waha; à Jerash, le Restaurant Libanais.
Gastronomie
Mansaf (riz, mouton et sauce au yogourt), mézé (homos, kebeh, kefta, taboulé, etc.), shawarna (sorte de döner kebab), arak (anisette), vin rouge Sainte-Catherine de Bethléem, bières Amstel et Heninger brassées en Jordanie sous licence.
Logements
A Jerash: le Government Rest House; à Amman: l’hôtel Mariott, le Méridien Amman; à Petra: Hôtel Mövenpick, Le Crown Plaza Resort, le Petra Guest house.
Plus typique
A Wadi Mousa (environ 15 km de Petra) se trouve un village bédouin transformé en hôtel, le Taybet Zaman. Il est doté d’un musée folklorique, d’un souk et d’un traditionnel hammam.