Madère, l’escale des conquistadors
L’afflux des vacanciers qui convergent vers Madère de tous les coins d’Europe, quelle que soit la saison, explique que ce territoire portugais ait fait du tourisme sa première économie, même si la majorité de ses plages sont faites de sable volcanique.
Au milieu de l’Atlantique, au large du Maroc, il est un petit archipel composé d’une île principale de 727 km2, et de sa petite sœur, l’île de Porto Santo d’une superficie de 43 km2, dont 9 km de plages de sable blanc, à laquelle s’ajoutent quelques îlots inhabités.
Madère est une sorte de grande montagne centrale et d’un plateau dont le pourtour est formé de côtes sauvages et de falaises abruptes entre lesquelles viennent se nicher des villages de pêcheurs.
Une latitude équivalente à celle du sud du Maroc lui octroie un climat subtropical doux tout au long de l’année, une aubaine pour les habitants de Madère qui voient pousser sans effort sur leur territoire une infinie variété de fruits, de légumes et de fleurs tropicaux. C’est un vrai bonheur pour les amateurs de jardins tropicaux qui les découvriront un peu partout dans l’île, le meilleur exemple étant la roseraie de la Quinta de Arco avec ses 1500 espèces de roses.
L’archétype du paysage côtier se compose de fermes accrochées aux collines, voire même aux falaises, entourées de plantations diverses, dont les plus fréquentes sont des bananeraies ou des champs de cannes à sucre. C’est un charmant damier multicolore que l’on admire depuis les nombreux belvédères le long de la route côtière escarpée. Parfois, on découvre un petit jardin dans un éboulis au bas d’une falaise.
Hormis les bananes et le vin de Madère, l’exportation des fleurs et des fruits tropicaux semble être modeste, le cas le plus surprenant étant la canne à sucre qui ne sert qu’à une production locale de mélasse qui, transformée en une sorte de rhum, servira à la composition du cocktail local appelé «poncha».
Funchal, l’escale des conquistadors
Comme les Açores, Madère fut une escale prisée pour les aventuriers navigateurs et autres conquistadors, tel João Gonçalves Zarco, avant d’affronter les furies de l’Atlantique. A la périphérie, une grande partie de la capitale porte le nom de «quartier touristique » et, outre des hôtels en tous genres, et tout ce qui va avec, comme restaurants, boutiques, magasins de souvenirs, etc. Mais plus attractif est le centre, où se trouve la vieille ville concentrée autour des rivières Santa Lucia et Joao Gomes. Outre le fort São Lourenço datant du XVIe siècle et la cathédrale, qui sont les monuments phares de la capitale de Madère, on découvre de vieux bâtiments de style Art Nouveaux que sont notamment celui qui servit au stockage du sucre de canne et la plus ancienne banque de Madère. Mais on retiendra surtout l’omniprésence d’azulejos (histoire de ne pas oublier que nous sommes au Portugal), qui ornent, entre autres, l’entrée du grand marché. Parlons-en: Il est divisé en deux espaces. L’un concerne les fleurs et les fruits tropicaux dont la variété est infinie; l’autre est plus spectaculaire encore, car il est dédié aux étals des poissonniers. Le marché aux poissons de Funchal a ceci de particulier qu’on peut observer, depuis la terrasse du marché aux fleurs, la virtuosité avec laquelle les poissonniers tranchent les filets des plus grands poissons comme les espadons ou les barracudas.
Un passage obligé est celui de la Rua Santa Maria pour admirer les peintures originales qui ornent ses portes et en font une ruelle d’art spontané.
Divin nectar
Mais qu’est-ce donc qui fait vivre les habitants de Madère? Logiquement vous direz: le fameux vin de Madère. C’est effectivement le cas depuis le traité de Methuen (1703) qui devait unir l’Angleterre et l’Espagne. A l’instar du porto ou du xérès, il devait fournir la Grande-Bretagne en vin jusqu’à nos jours. L’engouement des Britanniques pour le madère n’allait pas tarder à attirer des Anglais qui, ayant flairé la bonne affaire, allaient acheter des terrains à Madère pour y faire pousser de la vigne et vinifier le nectar. Voilà encore une attraction pour les visiteurs qui participeront à des séances de «vine tasting» dans leur hôtel où directement dans l’une des caves de l’île.
Le littoral sud
Le tour de la côte est un must à faire en voiture de location. La route est à flanc de montagne et, souvent, passe par une enfilade de tunnels qui facilitent grandement la liaison routière entre deux villages de bord de mer ou de montagne permettent d’aller d’un village à l’autre en un temps record. Cette route principale est reliée à des axes secondaires qui permettent de rejoindre les villages du littoral. La configuration de la plupart de ces villages est similaire. C’est un peu comme si le moindre espace plan au bas des montagnes à l’embouchure de cours d’eau ait été immédiatement occupé par des constructions villageoises. A quelques nuances près, on retrouve un peu partout le port de pêche, les terrasses de bistrots, les restaurants de poissons et les promenades le long de la mer. Càmara de Lobos est un peu le Saint-Tropez de Madère en raison de sa proximité de Funchal, la touristique. Les habitants s’y mêlent aux vacanciers en quête d’une brève évasion. Sa particularité est d’être surplombée par l’une des plus hautes falaises d’Europe, le Cap Giraõ. Son nom lui vient d’une colonie de phoques moines qui y séjourna jadis. La ville est entourée de vignes consacrées, bien entendu, au vin de Madère. La baie est le site favori des artistes peintres, dont Sir Winston Churchill dans les années 50.
Plus loin vers l’ouest, Ribeira Brava (rivière sauvage) est lovée entre deux falaises avec une forme de rade en fer à cheval; son église fait penser à celles des Açores. Sur le front de mer, l’esplanade est bordée d’une tonnelle où les pêcheurs s’adonnent à leur passion favorite du domino.
A une encablure de là se trouve Ponta do Sol avec sa plage de galets.
De ce village émane un calme olympien. C’est le coin le plus ensoleillé de l’île et les habitants de Madère vous affirmeront que c’est de là qu’on peut admirer les plus beaux couchers de soleil. Au large de Ponta do Sol, se trouve l’épave du Bowbelle, une drague qui opérait jadis sur la Tamise est, on s’en doute, le centre d’intérêt des plongeurs avec bouteilles. Tout autour s’étalent des cultures de vignes, de bananes et de cannes à sucre.
Plus à l’ouest encore, Madalena do Mar est un petit village dont le nom vient d’un prince polonais du XVe siècle, Henry Allemão. Il édifia une chapelle dédiée à sainte Marie-Madeleine. C’est un autre village de pêcheurs, avec une superbe promenade longeant la plage de galets.
Calheta est peut-être l’un des coins les plus touristiques de Madère. La raison en est l’aménagement de deux plages artificielles de sable doré dans un pays où la plupart sont faites de sable noir volcanique. Fondée
en 1430, elle fut l’un des premiers lieux à avoir été explorés par les colons. Au bord de la falaise surplombant la marina de Calheta trône Casa das Mudas et son centre artistique moderne accueillant régulièrement des expositions et des concerts. Calheta est aussi connue pour faire le meilleur rhum blanc du nom d’aguardente. Il faut visiter l’église Igreja de São Bento, le monument régional le mieux conservé, qui expose des peintures datant du XVIe siècle.
Le littoral nord
En descendant de la montagne, la première vision de Porto Moniz est une aiguille rocheuse sortant de la mer et ressemblant à celle d’Etretat. Le clou de cet endroit est l’enclos des piscines naturelles volcaniques où touristes et locaux se baignent presque toute l’année. Le fort historique de João Batista y fut édifi é en 1730 afi n de se protéger des attaques des pirates.
Plus à l’est, Santana est renommée pour ses maisons typiques de pierres triangulaires couvertes d’un toit en chaume. Datant du XVIe siècle, la plupart d’entre elles sont désormais conservées pour attirer les touristes, mais, surtout dans la périphérie du village, certaines d’entre elles sont encore habitées. Le long de la voie rapide se trouve la Quinta do Furão (un manoir) bénéficiant d’un panorama exceptionnel sur l’océan et le littoral.
Machico est une ville historique et la deuxième plus peuplée de l’île. Elle fut la première capitale de Madère de 1440 à 1496, et c’est là où s’installèrent les premiers explorateurs, en 1420. C’est à Machico que se trouve le gros œuvre spectaculaire qu’est la piste d’envol de l’aéroport de Funchal.
Texte et photos Gérard Blanc
Infos pratiques
Vol
Plusieurs correspondances par jour avec TAP Portugal au départ de Genève via Lisbonne.
A voir et à faire encore
Monter en télécabine du littoral aux hauteurs de Funchal et redescendre en «panier-toboggan», attraction touristique par excellence, mais avec de l’émotion garantie mêlée d’une admiration pour les sortes de «mushers» de toboggans, de véritables artistes pour guider l’embarcation à travers les ruelles tortueuses des hauts de Funchal.
Folklore
Il est, somme toute, assez similaire au folklore portugais du continent, avec des instruments courants comme la mandoline, l’accordéon, le chant, etc., et des danses de groupe rappelant celles de la Galice, retraçant les coutumes paysannes. Même si la chose est moins courue, on trouve des clubs de fado à Funchal.
Artisanat
Il y en a de multiples, mais on retiendra surtout les broderies dignes de virtuoses et les objets en rotin.